À la mémoire de Chokri Belaïd
La
violence est un phénomène parmi les plus dangereux qui commence à envahir la
scène publique tunisienne postrévolutionnaire. Dans cette nouvelle atmosphère
sociopolitique, on commence à parler des transformations qui marquent le comportement
quotidien vers un glissement à la violence verbale, morale et physique. Mais en même temps, ce qui frappe les
esprits, c’est le fait que ces changements ont lieu d’une manière très rapide
et dans une société qui se veut plus pacifique, dans une société qui se veut
pluraliste et démocratique, ce qui nous obligent à poser au moins trois
questions capitales :
* A-t-on
affaire à une nouvelle pratique socio-culturelle qui commence à
s’installer ?
* A-t-on enjeu
à un nouvel défi social ?
* Quelle image
de la révolution tunisienne la violence que l’on dit « nouvelle »
donne-elle ?
En
effet, les ferments de la cruauté humaine se situent vraisemblablement dans la
nature. Elle découle sans doute de certains comportements préhistoriques et
a-historque. Dans les deux cas, l’organisation psychique semble la même :
un instinct agressif doublé d’une absence de rationalité et une surcharge
narcissique.
Dans
la philosophie moderne de la violence, depuis Thomas Hobbes à Max Weber, l’État
est la seule institution qui se rend maîtresse du monopole de la violence pour
protéger les individus des agressions réciproques et interminables. Suivant cette optique tous recours à la
violence par les individus, pour servir leurs intérêts ou leurs passions,
devins hors la loi ; c'est-à-dire illégitime. Ce qui nous amène à dire, que suivant cette
optique, la violence politique est le terrain d’une condamnation systématique
dans la société. À première vue il semblerait aujourd’hui que les condamnations
morales de ce type de pratique soient devenues quasi unanimes dans notre
contexte historique actuel mais il conviendrait pourtant de ne pas oublier un
proche passé marqué par les agressions contre les opposons politique et contre
les mausolées des saints. Le risque d’un virage vers une situation d’anarchie
violente et incontrôlée est présent et menaçant. Néanmoins, il faut noter à ce
titre, que le recourt à la violence traduit une grande faiblesse éthique qui ne
peut pas éliminer le règne du rationalisme constructif.
Les
sociétés démocratiques tendent de plus en plus à considérer la violence comme
un échec politique et sociale. Maintenant, la société tunisienne doit considérer
ce type de conduite comme inutile, dangereux et condamnable. Il y là assurément un véritable danger, le
danger d’un double cynisme : celui des usagers de la violence quand ils ne
distinguent plus entre criminalité et sécurité publique et entre anarchie et
ordre social. Les enjeux sont grands
mais l’intellengicia tunisienne est capable de dépasser cette crise pour instaurer
un nouveau contrat social basé sur le pluralisme, la démocratie et l’État de
droit.
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