Depuis la
chute de la dictature en 2011, l’organisation d’élection libre et plurielle est
perçue par tunisiennes et les tunisiens comme un signe de vitalité démocratique
surtout quand cette élection favorise l’alternance au pouvoir. Néanmoins, il ne
faut pas croire que la chute d’une dictature signifiera l’apparition immédiate
d’une société idéale puisque la désintégration de la dictature n’est qu’un
point de départ, une condition sine qua non à l’approfondissement et
l’enracinement de la démocratie dans la pratique politique. Des efforts à long
terme permettront d’améliorer ce modèle tunisien pour faire face aux besoins
des citoyens. Pendant de longues années,
de sérieux problèmes politiques, économiques et
sociaux continueront à se poser et leur résolution exigera la
coopération des politiciens avec l’intelligentsia. Ainsi, les prochains
gouvernements se trouveront ainsi devant l’obligation de fournir des
opportunités à des gens ayant différents points de vue et souhaitant poursuivre
un travail constructif par des politiques de développement qui répondent aux
problèmes du futur. Il existe certaines
façons d’empêcher un retour vers l’arrière ou une réinstallation de l’ancienne
doctrine politique. Connaître à l’avance la capacité de défense de la
population peut parfois être suffisant pour dissuader toute tentative. Le
premier principe de la défense de cette mentalité est donc de refuser le retour
aux anciennes pratiques. En effet, il est très difficile pour les citoyens de
s’engager dans les affaires de la Cité s’ils ne sont pas conscients de ce
qu’être citoyen veut dire. C’est cette éducation à la citoyenneté qui leur
permettra de participer efficacement à la protection et à la promotion de la
démocratie. Ainsi, il revient aux pouvoirs publics de favoriser l’éducation des
citoyens. Cette éducation doit être débarrassée de tout contenu idéologique.
Car, c’est après avoir reçu une éducation citoyenne solide que les citoyens
peuvent choisir rationnellement de s’engager dans la « société politique »
ou plutôt de rester dans la « société civile ». Il en ressort que,
pour la vitalité démocratique, l’information et la formation du citoyen sont
des éléments indispensables. Les collectivités publiques doivent aider les
citoyens à exercer ces droits, ce qui donnera une meilleure crédibilité à
l’élection. Car quel sens donner au vote si les citoyens ne sont pas conscients
de l’enjeu de cet acte ?
dimanche 28 décembre 2014
mardi 11 novembre 2014
Réussir la transition démocratique dans les pays du printemps arabe : Enjeux et défis
Depuis trois ans
maintenant, la paix des dictatures arabes a été sérieusement perturbée par une
montée de la contestation populaire. Cette contestation usa, pour se faire
entendre, de toutes les formes traditionnelles ou inédites du rejet populaire
de l’autoritarisme. Ainsi, la multiplication et la généralisation des nouvelles
méthodes, inhabituelles, de s’emparer de la scène politique qui s’articulaient
alors à d’autre raisons conjoncturelles de mettre la société en mouvement
(résultats économiques lamentables, corruptions administratives, perturbations sociales…)
font que cette période a été analysées par les spécialistes de la région comme
une « ère de trouble » marquée par une tendance de démocratisation,
ou encore comme un moment de colère, certes inattendue par les pouvoirs en
place, mais qui extériorisait en réalité une frustration longtemps ingurgitée
et contenue par les victimes des violences multiformes orchestrées et
développées sur la longue durée par les dictatures arabes. Toujours est-il qu’à
tous points de vue, le début de la révolution tunisienne est le point zéro,
l’épicentre de l’intelligibilité historique, sociologique et politique de la
nouvelle vague des tentatives de démocratisation des sociétés arabes. En effet,
l’inscription de l’année 2011 dans l’ordinaire et l’imaginaire des pouvoirs et
des sociétés arabes comme période de « désordre » ou au contraire
comme une période de « renaissance » de la vitalité populaire indique
que, par delà toute querelle politique ou idéologique, cette année du zéro est
le point géométrique par lequel doit transiter toute analyse de la mémoire et
de la situation politique actuelle. Comme repère, l’année 2011 est plus que
pertinent pour le cas de l’analyse de la transition démocratique dans la région
du « printemps arabe ». Ainsi, cette transition vers la démocratie
peut désigner le passage d’un contexte politique oligarchique vers un nouveau
contexte où la pratique politique devra dépendre du débat et du suffrage
populaire. Autrement dit, parler de la transition démocratique dans le monde
arabe, c’est se focaliser sur ce moment de rupture entre les pratiques d’un
pouvoir qui règne par la terreur et la pensée unique diligentée par le haut et
son contraire, c'est-à-dire l’institutionnalisation d’un accès à la
représentation par une compétition au sein d’une pluralité d’opinions
politiques qui se côtoient et s’affrontent. Bien entendu, pour conduire à une
telle pluralité, les choix des termes et des réformes dits de
« transition » devraient être eux-mêmes en soi
« démocratiques », c'est-à-dire refléter un large consensus fondateur
entre les acteurs politiques appelés à s’affronter dans ce procès de la
démocratisation et à déborder le cadre égoïste des idéologies et des attentes
partisanes pour se préoccuper, à l’échelle de chaque pays arabe, de l’instauration
de la démocratie dans ses termes universels de « pouvoir du peuple par le peuple et pour le peuple ». Un tel
programme permettrait à la transition de produire des normes
propres à la démocratie classique. Et, sur le terrain institutionnel,
d’instaurer une convivialité de fait qui permettait de gouverner la société par
un dialogue permettant entre les acteurs politiques de tous bords et le reste
de la société civile. Enfin, ce dépassement des égoïsmes partisans permettrait
à la transition démocratique d’être le moment de la mise en place d’une
démocratie fonctionnelle, c'est-à-dire qui ne tiendrait son sens que de
l’invention des mécanismes objectifs et stables de la sélection des élites.
dimanche 2 novembre 2014
La naissance de la deuxième république : La Tunisie au lendemain des législatives
Les deuxièmes
élections démocratiques dans la Tunisie postrévolutionnaire, qui se sont
déroulées le 26 octobre 2014, ont vu la droite s’imposer dans la scène
politique avec 39 % pour Nidaa Tounès et 31 % pour Ennahdha. De son côté, la
gauche est arrivée en troisième position avec 7,3% pour le Front Populaire. Ainsi,
les partis de la droite « patriotique » comme celle de la droite « islamiste »
ont obtenu des résultats trois fois supérieurs à ceux de la gauche dans ce
deuxième scrutin législatif. Ces « performances » de la droite tunisienne dans certaines régions
laissent entrevoir la possibilité d’une résurgence de l’ancienne architecture
parlementaire. En effet, les législatives de 2014 marquent un échec flagrant
des partis militants : Avec un seul siège pour El-Joumhouri (l’ancien PDP)
et de même pour Ettakatol, la présence de la famille démocrate-progressiste,
demeure marginale dans le deuxième parlement postrévolutionnaire.
La répartition des sièges dans le
parlement
|
||
Classification
|
PARTI POLITIQUE
|
NOMBRE DE SIÈGE(S)
|
1
|
Nidaa Tounès
|
85
|
2
|
Ennahdha
|
69
|
3
|
UPL
|
17
|
4
|
Front Populaire
|
16
|
5
|
Afèk Tounès
|
8
|
6
|
CPR
|
4
|
7
|
L’initiative
|
3
|
8
|
Le mouvement Populaire
|
4
|
9
|
Le courant démocratique
|
3
|
10
|
Le courant de l’amour
|
2
|
11
|
El-Joumhouri
|
1
|
12
|
Ettakatol
|
1
|
13
|
L’alliance démocratique
|
1
|
14
|
Parti Al-Majd
|
1
|
15
|
Front du salut national
|
1
|
16
|
Les démocrates socialistes
|
1
|
17
|
La voix des tunisiens à l’étranger
|
1
|
18
|
La voix des agriculteurs
|
1
|
19
|
Rad El-eatibar
|
1
|
Ces résultats ont confirmé la
bipolarisation entre Ennahdha et Nidaa Tounès, déjà perçue de longue date dans
le paysage politique tunisien. Néanmoins, il faut noter un certain flou
conceptuel post-législatif. L'abondance des analyses n'a guère permis de clarifier
théoriquement la nature du problème posé. « Démocratisation », « transition
démocratique », « libéralisation politique », « société en transition », sont
autant de concepts qui couvrent des
approches peu ou prou identiques et dont les nuances demeurent difficiles à
cerner. L'absence d'un cadre de référence théorique rend difficile toute
entreprise de décryptage des processus en cours. La banalisation de la transition constitue-t-elle
la condition nécessaire à toute entreprise
de démocratisation ? La « transition démocratique
» suggère-t-elle un « arrangement » dans la sphère politique permettant une participation
institutionnelle pluraliste, à l'instar du
modèle allemand ?
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