mardi 31 mai 2011

L’Éclat de la vérité




      Une analyse rigoureuse, sérieuse et distancée des enseignements du soulèvement populaire de 14 Janvier 2011 serait utile pour comprendre les ressorts de l’évolution de la société tunisienne. Pour illustrer mes propos, je me focaliserai sur le rôle des jeunes, toutes catégories sociales confondues, dans la cristallisation et la structuration de ce mouvement historique. Je constate d’abord que les acteurs politique du pouvoir Ben Ali ont longtemps sous-estimé les nouvelles formes de politisation qui gagnaient la jeunesse tunisienne, et notamment les diplômés des universités. L’idée force de « l’Ancien Régime » voulu voire dans les jeunes tunisiens des imbéciles matérialistes, voire « Khobziztes », sans idéale politique et que leurs seuls étaient de consommer les dernières gadgets à la mode, de suivre les matchs de football, et de courir derrières les désirs charnels… (Etc.). Cette « idée-force » est totalement erronée et pour preuve ; l’intérêt qu’ils ressentent à la vie politique et intellectuelle dans la « Tunisie postrévolutionnaire » est énorme. Pour la quasi-totalité de ces jeunes, le régime Ben Ali apparaissaient totalement archaïque, antique et déconnecté de leurs aspirations. Le 25 Juillet 2010, lors de la faite de la République, Ben Ali a essayé de se rattrapé on créant le « Parlement des Jeunes » et on faisant de l’année 2011, l’année nationale, puis internationale de la Jeunesse. Mais c’était trop tard pour un régime basé sur la corruption et sur un clan dont les mécanismes sont très proches du système féodal connu en Europe entre le XIème et le XIIIème siècle.  Ainsi, les modes d’expression et de protestation utilisée par les jeunes contre le régime Ben Ali se démarquaient nettement dans la forme et dans le contenu des messages qu’ils véhiculaient. Jadis, les opposants du pouvoir s’appuyaient fréquemment sur la rédaction des pétitions, la distribution des tracts, les interventions dans les Radios et les Télévisions étrangers, la solidarité des Partis opposantes, les grèves de faim …(Etc.), leurs revendications s’exprimaient sous forme d’appelle à la sagesse, à la responsabilité et au bon sens, pour éviter au pays le chaos politique et institutionnel.  Aujourd’hui avec l’arrivée d’une nouvelle génération née sous « l’ère de grande révolution technologique », des changements notoires allaient s’opérer : D’une part, le rôle joué par les technologies de communication (essentiellement Internet à travers les réseaux sociaux), et l’usage du téléphone mobile à caméra fut déterminant. D’autre part, l’image des corps des jeunes transformés en boule de feu qui circulait à travers les vidéos, avaient donné plus de prégnance et de visibilité au mouvement populaire qui émergeait déjà.        

lundi 23 mai 2011

Entre rupture et continuité




 C’est un lieu commun de faire de la rupture avec l’ordre établi une condition sine qua non de la réalisation  de la révolution. Mais, la notion de rupture est moins évidente à saisir qu’il n’y parait. Elle n’est jamais définie définitivement, car c’est dans le feu de l’action qu’on fixe son plafond et toujours d’une manière provisoire en rapport avec le contexte. Il n’est pas exclu d’ailleurs qu’elle débouche sur la notion antinomique de la continuité.

En Tunisie, en l’espace de quelques semaines, la rupture a changé plusieurs fois le contenu. Le manque des libertés collectives et individuelles a révélé la nécessité de rompre avec un politique fasciste et totalitaire. Les réactions maladroite du pouvoir et de toute façon tardives du pouvoir de Ben Ali et son clan, son discours de 13/01/ 2011 est plutôt un plaidoyer qu’une solution aux problèmes accumulés durant 23 ans de vole et de dictature. Au lendemain de la fuite historique du « chef suprême de l’État », puis de son clan et du Parti qui lui est associé (RCD) la Tunisie rompe totalement avec une ère et commence une nouvelle. Ainsi on commence à parlé de la IIème république, de la nouvelle constitution et du nouveau régime politique est-ce il présidentiel ou parlementaire ? La recherche du « temps perdu » ou le retour à une période considérée idyllique fournit une autre dimension à la rupture, celle de la continuité. Ce résultat paradoxal est, en fait, le résultat du passage de l’enthousiasme à la peur : Peur de perdre des acquis, mais aussi de provoquer un désordre sociale, défavorable à la notion de l’État moderne.
Maintenant, il faut dire que rupture en temps révolutionnaire rime aussi avec surenchère, du moins pour une catégorie de personne, celle qui, par opportunisme, n’a pas d’autre moins de se saisir de la rupture comme d’une arme de la dernière chance. La notion de rupture elle même se présente alors de plus en plus filigrane, servant de prétexte à certaines idéologies ou de stratégies de gestion de risques. En revanche, l’approche de cette notion est inhérente à l’étude des acteurs et des intermédiaires. Elle requiert de la part du chercheur une analyse à la fois du discours et de la pratique des uns et des autres pour distinguer la rupture qui a favorisé une dynamique d’innovation de celle qui a suscité plutôt le besoin de continuité sous une autre forme d’une situation révolutionnaire.    

     

mardi 10 mai 2011

Le passé, Le présent, L'avenir




 Le rapport des révolutionnaires de 1789 à l’histoire est complexe ; il leur faut s’approprier une science humaine dont la monarchie française  a fait son apanage, composer avec le mythe des origines auquel renvoient leurs volontés régénératrices, et ce dans le moment même où ils ont conscience d’écrire par leurs actes l’Histoire contemporaine, de la mettre en scène, de créer de nouveaux héros. Babeuf, en Juillet 1789, voit dans le passé les sources de la violence populaire : « Les maitre, au lieu de nos policier, nous ont rendu barbares parce qu’ils le sont eux-mêmes ». Robespierre, le 8 Thermidor (le 11ème mois du calendrier révolutionnaire français), avec l’assurance de l’immortalité, offre sa vie à ses ennemis : « Oh ! Je la leur abandonnerai sans regret, j’ai l’expérience du passé et je vois l’avenir ». Entre ces deux temps, le passé et le futur, l’ancien et le nouveau régime, pour certains l’Histoire et le Jugement dernier, quelle place réserver à un présent qui résiste ? Je pose comme credo centrale des « Hommes de la Révolution » que la Révolution n’a pas d’âge ; que chaque génération peur à bon droit se dire la première ; qu’eux-mêmes sont des « enfants sans mères », selon l’épigraphe de L’Esprit des lois, ce que Bruke traduira sarcastiquement par « les mouches d’un seul été » ; qu’ils sont en mesure de construire délibérément et intégralement l’ordre social et politique ; qu’à cette construction ne peut servir rien qui appartienne au passé. L’Histoire ne fournit ni précèdent ni appui, la durée n’a rien à dire sur la valeur. Sans doute la lecture de Locke peut-elle inspirer une telle attitude. Dans ses deux traités de gouvernement (1690), n’affirme t-il pas que la dissolution de la souveraineté laisse le sujet redevenir homme, libre de sa volonté particulière, membre de la société mais d’aucun corps politique, en droit de recommencer son Histoire : « La révolution plus encore qu’en la disparition de la puissance souveraine, consiste en cette instauration qui la suit … . La notion d’une histoire à construire en cas de dissolution de la souveraineté, histoire à construire dans le vide du pouvoir, la décomposition du processus historique, le décentrement imposé à la causalité révolutionnaire conduisaient la réflexion sur le devenir historique à s’attacher aux mécanismes d’altération et de dissolution de la puissance souveraine, causes premières de la révolution nécessaires » note Jean Marie Goulemot.  
  Les discours sont légion qui paraissent légitimer cette implication dans le temps-présent, elle est en 1789, « année sans pareil », fort différente selon l’origine sociale des témoins, leurs distances du centre du pouvoir. Et pour en rester à des formules célèbres, rappelons l’apostrophe du Conventionnel Lebas après la mort du roi : « Nous voilà lancés, les chemins sont rompus derrières nous, il faut aller de l’avant, bon gré, mal gré, et c’est à présent surtout qu’on peut dire : vivre libre ou mourir. L’ancienneté d’une loi ne prouve autre chose, sinon qu’elle est ancienne… . L’Histoire n’est pas notre code », proclame à lui Rabaut Saint-Étienne, disqualifiant tradition et coutume pour laisser place à la volonté de « recommencer le monde ». Si l’Histoire, perçue dans ses finalités politiques – une histoire philosophique et civique des peuples – des progrès des droits de l’homme et de l’égalité sociale devient un élément essentiel de la politique éducative, le temps présent parait s’imposer. L’accélération, qui rétrécit les champs de l’expérience et met sans cesse en jeu de nouvelles inconnue, impose une complexité qui rend plus qui rend plus urgentes les tentatives d’écriture, de mise en forme, non sans risque : Wolfgang Krug, en 1796, distinguant « l’Histoire récente » et « l’Histoire la plus récente », c'est-à-dire « l’Histoire du jour même », considéré qu’elle a souvent une grande analogie avec l’Histoire mythique, pour ce qui est l’incertitude.   
  

lundi 2 mai 2011

Ad honores !!!





En ces temps, de profondes mutations où les principes de la démocratie et de laïcité sont souvent jetées en pâture par les mouvements islamistes, en ces temps où le message du dialogue inter-religieux est tronqué, simplifié, exploité de manière effrontée par tous ceux qui, au nom d'intérêts cynique ou par goût de l'agitation politique, exploitent les malheurs de l'humanité, la frustration sociale, l'exclusion et l'ignorance pour inciter à la haine, au fanatisme et à l'assassinat ; en ces temps troublés, dis-je, comment ne pas être non seulement honoré mais aussi ému d'être un tunisien, issu d'une grande civilisation qui a marqué fortement le monde à travers de grandes figures universelle tel que Hannibal Barca, Tertullien, Saint Cyprien, Saint Augustin, Ibn Khaldun...(Etc.). 


À l'heure où les images qui défilent journellement sur nos écrans nous heurtent par la violence consécutive à l'incompréhension, l'arrogance des puissants et à la détresse de plus grand nombre, la révolution tunisienne a tracer une étapes fondamentale dans une Tunisie qui a demeuré plus de 50 ans dans un régime totalitaire inspiré par la bonne guidance de sa Sainteté vers la démocratie et la laïcité. Mais des dangers semble dans les horizons, car on assiste à la monter de l'Islam politique et de l'Islam radical (dit Salafiste). 

Je propose dans cet article de faire une marche arrière pour bien éclairer une notion clé, mais qui reste ambiguë, celle de la Démocratie. Ce terme désigne le régime politique mis en place dans la Polis Grecque durant l'Antiquité classique et réputer être l'ancêtre des démocraties moderne et contemporaines. Etymologiquement, le mot démocratie vient du mot grecque Dêmos (le peuple) et Kratos (le pouvoir).  La naissance de la démocratie peut être considérée par rapport à un horizon politique au sens large du terme qui va rendre cette réforme possible et nécessaire, une crise politique et sociale totale, la stasis. Les citoyens qui régissent leurs affaires sont amenés à réfléchir au meilleur système politique, à la meilleure politeia, c’est à dire la meilleure façon de s’organiser pour surmonter cette crise multiple. 

La démocratie trouve son origine dans la grave grise de la cité grecque et les mutations propres à Athènes. Au VIème siècle a.j., les cités du monde grec sont confrontées à une grave crise politique, résultant de deux phénomène concomitants : D'une part l'esclavage pour dettes, liant situation politique et situation financière, touche un nombre grandissant de paysans non propriétaires terriens: l'inégalité politique et le mécontentement   et le mécontentement sont forts dans le milieu rural ; d'autre part le développement de la monnaie et des échanges commerciaux fait émerger une nouvelle classe sociale urbaine aisée, composée des artisans et armateurs, qui revendique la fin du monopole des nobles sur la sphère politique. Pour répondre à cette double crise, de nombreuses cités modifient radicalement leur organisation politique. À  Athènes  un ensemble de réformes amorce un processus débouchant , au Vème  siècle av.j-c., sur l'apparition d'un régime politique  inédit : une sorte de démocratie  pour les hommes libres mais avec la continuation de  l’esclavage. À titre d'exemple un philosophe dit que  «  La démocratie est née historiquement comme une limite mise au pouvoir de la propriété. C’est le sens des grandes réformes qui ont institué la démocratie dans la Grèce antique : la réforme de Clisthène qui, au VIème siècle av. J.-C., a institué la communauté politique sur la base d’une redistribution territoriale abstraite qui cassait le pouvoir local des riches propriétaires ; la réforme de Solon interdisant l’esclavage pour dettes ». (Voir. RANCIERE (J), "La démocratie est née d'une limitation du pouvoir de la propriété", in Alternative Littéraire, 2007, n°167).  Cet éclairage historique me semble très significatif car le cas Athéniens me semble très proche de la réalité tunisienne, avec un peu de différences.  

Le 14 Janvier 2011, notre peuple a parlé et il a donné sa parole finale qui a mit fin à 23 ans de régime mafieux et à 57 ans de régime autoritaire. Mais il faut dire que la révolution n'a pas donné encore ses fruits; les mouvements islamistes sont en véritable course pour le pouvoir, le statut de la femme tunisienne (qui est un grand acquis de la Tunisie  contemporaine) est en danger. C'est pourquoi, j'invite tout les intellectuels tunisiens à collaborer entre eux pour créer une barrière contre "un Tsunami" islamiste qui semble dans les horizons. 


Ad Augusta per Angusta ! Bonis Ben.